Coucou les filles ! Je me présente : Nora, nouvelle green reporter au Maroc.
Aujourd’hui est un grand jour : il s’agit du premier portrait d’une femme de talent marocaine sur le blog.
Inspirée et inspirante, motivée et motivante, j’ai eu l’honneur de rencontrer Oumaima, bloggueuse, youtubeuse et auto-entrepreneuse green que vous pouvez retrouver ici. C’est dans un café très cosy et discret de la capitale économique du royaume qu’a eu lieu notre rendez-vous.
C’est avec un visage radieux qu’Oumaima (Oummey pour les intimes) m’a accueilli et m’a chaleureusement prise dans ses bras. Bienveillance et fraternité 100% made in Morocco !
Après s’être installées confortablement, l’interview a pu commencer.
Nora : Peux-tu te présenter ?
Oumaima : Je m’appelle Oumaima Abba. J’habite à Casablanca et j’ai 28 ans. J’ai fais des études en communication et en publicité pour obtenir mon master en 2013. J’ai travaillé pour une boîte d’événementiel et d’édition en tant que rédactrice et chargé de communication mais j’ai démissionné au bout de trois ans.
J’ai lancé mon blog en avril 2016 mais je ne l’alimentais pas beaucoup car je n’avais pas le temps. Après ma démission, j’ai approfondis l’univers de mon blog. Ensuite, ça a dégénéré (rires) : j’ai commencé à faire des ateliers pour les enfants et pour les adultes. En avril dernier, j’ai lancé ma ligne de produits cosmétiques naturels. J’ai du mal à réaliser ce qu’il se passe : en quelques mois, il s’est passé tellement de choses alors que ce n’était pas planifié.
Nora : Comment es-tu passé à un mode de vie plus respectueux de l’environnement ? Quel a été ton déclic ?
Oumaima : Cela a commencé il y a 5 ans. J’avais des problèmes d’acné et je voulais trouver une solution. J’étais accro à une marque de cosmétiques spécialement dédiée aux peaux réactives. Je possédais toute la gamme mais les résultats n’étaient pas là.
Le vrai déclic s’est produit un jour alors que je me démaquillais dans la salle de bain avec ma Sœur. Elle m’a dit : Oumaima, tu es une victime du marketing. Je l’ai très mal pris. Surtout après avoir étudié la communication, entendre que je suis tombée dans le panneau m’a fait un choc.
J’ai réfléchis et j’ai réalisé qu’elle avait raison : je m’attachais à l’image des produits et leur packaging et non le résultat.
Mon moteur a été mon problème d’acné : j’ai commencé à faire des recherches sur Internet et j’ai trouvé des recettes naturelles. Je tombais souvent sur des articles qui parlaient d’ingrédients à éviter. J’ai alors pris conscience que je devais lire la composition des produits et j’ai appris à déchiffrer la liste INCI. De ce fait, j’ai compris que ce qui était nocif pour ma santé était aussi nocif pour l’environnement. J’étais très en colère et déçue : j’ai compris qu’on ne nous disait pas toute la vérité, notamment la marque en laquelle j’avais placé toute ma confiance.
C’est ainsi que j’ai commencé à faire mes propres recettes et à les tester puis à les partager autour de moi. C’est comme ça que m’est venu l’idée de créer une seule plateforme où poster mes recettes : le blog withoummey.com.
Nora : Ton activité professionnelle est-elle en rapport avec l’écologie ?
Oumaima : Oui : mes produits cosmétiques et les ateliers que j’organise. Malheureusement, j’ai délaissé mon blog et ma chaîne youtube par manque de temps. Les priorités se sont inversées. Mais je compense par du contenu éphémère sur les réseaux sociaux qui prend moins de temps à produire.
Nora : Quelles sont les actions que tu mènes au quotidien en faveur de l’environnement ?
Oumaima : A mon niveau et au quotidien, j’évite de produire des déchets. Je n’achète plus de bouteille d’eau, je commande des jus sans la paille (et lors de notre rendez-vous, Oummey n’a pas manqué à ses bonnes habitudes !), je fais les courses avec des sacs en tissus réutilisables. Je fais attention à ne pas gaspiller l’eau et à bien à éteindre la lumière.
Ce qui demande un peu plus d’effort est le fait de privilégier la marche à pied plutôt que la voiture. Puis aussi consommer bio quand l’occasion me le permet.
Nora : Tu arrives à consommer bio régulièrement ?
Oumaima : Non, franchement non.
Nora : Quel est le problème que tu rencontres ?
Oumaima : L’accessibilité géographique et financière. C’est vrai que le bio est disponible dans les magasins mais c’est souvent très cher. En plus de cela, je vis encore avec mes Parents et ce n’est pas moi qui fais les courses. Lorsque j’achète bio, ce sont des aliments que je consomme à titre personnel. Malgré tout, j’essaye de les encourager à manger bio mais passé un certain âge, c’est difficile de les convaincre. Je ne peux pas leur imposer cela.
Nora : Peux-tu nous présenter les produits que tu vends ?
Oumaima : La gamme comprend un déodorant et un dentifrice. Ce sont des recettes que j’ai adapté au fil des années. J’ai commencé par commercialiser ces deux produits car je les fais pour moi-même ainsi que mon entourage depuis 4/5 ans : je maîtrise la recette et je suis sur de l’efficacité. Les ingrédients sont certifiés bio sauf la cire d’abeille.
Franchement, j’ai honte de dire que j’importe les ingrédients mais je le fais car je veux proposer des produits de qualité.
Nora : Dans un avenir proche, tu préfèrerais privilégier les produits locaux pour rester dans ta logique green ?
Oumaima : Absolument. Quand l’opportunité se présente, je vais toujours tester un produit local. Après certains produits seront toujours importés comme l’huile de coco par exemple qui n’est pas un produit du terroir.
Nora : Par quelle plateforme vends-tu tes produits ?
Oumaima : Le blog me sert de vitrine mais les commandes se font via message privé sur Instagram ou sur Facebook, sinon lors d’évènement où j’expose physiquement mes produits.
J’ai eu des propositions de collaboration avec des distributeurs mais j’ai toujours refusé. J’ai l’impression que j’ai besoin d’être là pour expliquer, pour rassurer les gens qui veulent en apprendre plus. C’est nouveau : la formule est différente, la texture est différente, le packaging n’a rien à voir avec les produits conventionnels. Il y a vraiment des doutes à calmer et des questions auxquelles il faut répondre.
Nora : Est-ce que tu souhaites à l’avenir développer de nouveaux projets ?
Oumaima : Yes, c’est même en cours.
Nora : Peux-tu nous en parler ?
Oumaima : Oui (rires) ! Ce sont deux nouveaux produits cosmétiques. Le premier est un produit que j’ai là aussi l’habitude de faire depuis des années. C’est un baume réparateur multi-usages unisexe : on peut l’utiliser en temps que baume à lèvres, pour les petits bobos, les zones de sècheresse. Le deuxième produit est issu d’un besoin qui s’est fait ressentir lors de mes échanges avec les gens : le shampoing solide. C’est la première fois que j’en fais : il est en phase de test. Après la période d’essai, je vais pouvoir le lancer.
Mais pas de date limite fixée : en mode slow life (rires).
Nora : Peux-tu nous parler plus précisément des ateliers que tu organises ?
Oumaima : Les ateliers ont commencé lors de ma démission. C’est avec l’aide de ma naturopathe de l’époque que j’ai pu y voir plus clair. Elle m’a donné l’idée d’ateliers pour les enfants et m’a proposé de faire cela dans son cabinet.
Je n’en ai pas beaucoup fais dans le domaine privé mais plutôt lors d’évènements publics.
Nora : Quel est le contenu de ces ateliers ?
Oumaima : L’atelier se divise en trois phases. La première partie est dédiée à la visualisation : on projette un film sur une thématique écologique. La deuxième partie est dédiée à la discussion : on voit ce que les enfants ont retenu, on répond à leurs questions. La troisième partie est le « fun time » (rires) : ce sont des DIY. On organise des ateliers de jardinage, d’upcycling toujours en gardant un côté créatif. J’ai toujours adoré faire du dessin, colorier alors j’ai trouvé un prétexte pour continuer à le faire (rires). L’essentiel est que les enfants repartent avec un souvenir et un message qu’ils diffusent à leurs parents. J’ai la prétention de vouloir toucher tout le monde mais de différentes façons.
Nora : Qu’en est-il des ateliers pour adultes ?
Oumaima : Il s’agit d’ateliers en entreprise : une animation en interne en petits groupes. Mon premier atelier avait pour thème le bicarbonate de soude : alternative aux produits ménagers, ses bienfaits pour la santé et le bien-être. S’est suivi un DIY de diffuseur d’huiles essentielles que les salariés ont ensuite emporté chez eux.
On m’a ensuite sollicité pour faire des « talk » pour parler de ma transition. Cela s’est passé dans le cadre d’évènements dans la thématique du naturel et du développement durable.
Nora : En quelle langue sont proposés tes ateliers ?
Oumaima : J’ai fais des ateliers en anglais. Mais cela reste en fonction de la demande. J’adapte selon mon audience : j’adapte à la fois la langue et le vocabulaire. J’essaye de reconnaître ma cible et je m’adapte. Mon objectif est de faire passer le message. J’ai le luxe de jongler entre l’arabe, le français et l’anglais donc j’en profite.
Nora : Considères-tu que le Maroc est un pays qui tend de plus en plus vers l’écologie ?
Oumaima : Oui, c’est une thématique récurrente. On sent que les gens s’y intéressent. Pour moi la plus grande preuve réside dans les médias. Sur les chaînes nationales de télévision, il y a des plages horaires dédiées à l’écologie. Par exemple, la chaîne de télévision nationale 2M propose dans son Journal Télévisé de 12h une rubrique écologique. Si on accorde du temps à l’antenne pour l’environnement, cela veut dire que les choses sont en train de changer.
Cela provient des hautes sphères : une volonté politique de faire du Maroc un pays leader en termes de protection de l’environnement. On peut citer l’organisation de la COP 22 à Marrakech.
Nora : Cites-moi le plus gros progrès écologique du Maroc.
Oumaima : Je dirai le « zéro mika » (trad : zéro sachets en plastique, réforme mise en place le 1er juillet 2016 visant à interdire totalement les sacs en plastique). Même si le résultat est discutable car on retrouve toujours des sacs en plastique, l’impact en terme de buzz a été énorme.
Le terme « écologie » a été introduit à la population. Pour ma part, j’estime que la culture populaire marocaine est déjà « écologique ». Notre mode de vie et nos références religieuses nous demandent de faire attention au gaspillage, de protéger la nature etc. On a les bases mais on n’appelle pas ça « écologie ». Ce n’est pas un terme que l’on utilise à la maison. En cela, le zéro mika a fait réagir : tout le monde n’était pas content mais l’essentiel est que ça a fait parler d’écologie.
Le zéro mika nous a éduqué (rires) ! Avoir des lois et des sanctions jouent un rôle pour faire changer les choses de façon aussi radicale. On n’est pas toujours sur des résultats mais on est sur que cela va créer une réaction et faire réfléchir.
Nora : Cites-moi l’adresse green incontournable à Casa.
Oumaima : La forêt de Bouskoura : on fait le plein de verdure.
Nora : Un magasin ? Un restaurant ? Une enseigne bio ?
Oumaima : On peut trouver de la « bouffe » bio sans que ce soit forcément « écolo ». Célébrer son côté écolo à 100% n’est pas possible. Néanmoins, si chacun fait un effort où qu’il soit, on peut consommer plus green : commander à boire sans demander la paille par exemple. Tu peux rendre écologique n’importe quel lieu.
Nora : Tu penses que les restaurants « bio » de Casablanca ont encore du travail à faire ? Tu n’es pas satisfaite de l’offre proposée ?
Oumaima : Non mais je comprends aussi. C’est tout nouveau. Ensuite, on ne va pas oublier que c’est un endroit qui est censé générer des revenus donc ils ont d’autres soucis en parallèle.
Il n’y a pas un endroit où tu peux consommer green à 100% : on te prépare un jus, que fait-on des épluchures ? L’utilisation de l’électricité ? Le recyclage ?
J’essaye de réfléchir à une enseigne green de A à Z mais cela m’échappe, peut-être que je ne suis pas au courant. A la rigueur, je peux citer les écolodge.
Nora : Pour finir, connaissais-tu Peau Neuve ? As-tu déjà consulté son blog ? Qu’en penses-tu ?
Oumaima : Oui Tata Peau Neuve (rires). Je pense qu’elle a mis la barre trop haut ! C’est finalement une référence dans le domaine. C’est comme le grand livre encyclopédique que tu vas avoir à la maison et que tu vas checker à chaque fois que tu as besoin d’une info. Son blog est tellement bien fait, bien structuré, on sent le professionnalisme qui est derrière. J’adore le fait que la personne qui est derrière ne cherche pas à se mettre elle en avant : c’est impressionnant. Je salue et j’applaudis sincèrement l’effort : c’est un investissement qui est fait pour le partage et pour une noble cause. Merci d’exister Tata Peau Neuve !
Nora : Que penses-tu de l’initiative de mettre en avant le côté green du Maroc sur le blog ?
Oumaima : Ca serait sympa à mon sens de mettre en avant le fait que le marocain lambda est écolo par intuition. Quand on y réfléchit un peu, si on faisait marche arrière 50 ans en arrière, on a toutes les solutions. On peut citer en exemple la jarre d’eau en terre cuite qui purifie l’eau, les paniers en osier. Tu as les bonnes pratiques green instaurées dans le quotidien. C’est peut-être notre envie de nous moderniser qui nous a fait perdre des réflexes écolos qui font partie de notre patrimoine. Les solutions sont en nous : il suffit de faire renaître le Maroc d’antan. A mon avis, ce n’est pas quelque chose que l’on va devoir adopter de 0 car c’est déjà en nous, il ne faut pas avoir honte de notre patrimoine qui a survécu depuis si longtemps. Le Maroc est écolo par nature.
Après avoir terminé l’interview, nous avons commandé deux jus (sans la paille bien sur !) et dégusté de délicieuses energy balls d’une marque marocaine gentiment ramenés par Oumaima en papotant de tout et de rien.
Un merveilleux moment passé en compagnie d’une merveilleuse femme. J’en suis ressortie gonflée à bloc, prête à découvrir toutes les perles green qui se cachent dans Casablanca.
A bientôt pour un nouvel article sur le Maroc green !